Cette œuvre, qui est l’une des plus importantes et volumineuses d’Adrienne von Speyr, couronne ses commentaires des écrits de Saint Jean. Le Père Balthasar nous dit que ces dictées furent elles-mêmes « uniques, véritablement apocalyptiques (en comparaison des autres dictées relativement sereines), marquées par des rapts et des digressions ». Ces dictées commencèrent avec le chapitre 12 de l’Apocalypse (la vision de la Femme qui enfante un Fils), se poursuivirent jusqu’au chapitre 19, puis recommencèrent avec les chapitres 1 à 11 pour se conclure avec les chapitres 20 à 22. Ce commentaire nous introduit dans un monde objectif d’images qui font partie de la révélation de Dieu et que Dieu remet aujourd’hui aussi à chaque chrétien. La parole centrale qu’Adrienne von Speyr comme Hans Urs von Balthasar mettent en relief est « la patiente persévérance des saints » qui, au milieu des tentations et des luttes de ce monde, conservent la foi, l’amour et l’espérance en Jésus : « Oui, mon retour est proche ! Amen, viens, Seigneur Jésus » (Ap 22,20).

Les principaux thèmes de ce livre ont été présentés par Balthasar dans l’introduction : De la riche tapisserie de ce commentaire sur l’Apocalypse de Saint Jean se dégagent trois motifs principaux : 1. Les conditions subjectives chez l’apôtre pour la réception des visions. 2. Les formes de vérité propres aux visions. 3. Les contenus des visions.

L’énumération de ces motifs montre que l’œuvre d’Adrienne von Speyr s’appuie sur des présupposés qui, sans être prouvés explicitement (car il ne s’agit pas d’un travail scientifique), n’en sont pas moins formulés à la lumière de la tradition ecclésiale. À savoir : l’auteur de l’Apocalypse est le disciple bien-aimé ; c’est son dernier écrit, rédigé après son évangile et ses lettres. Ses paroles sont à prendre à la lettre : il a réellement vu ce qu’il dit avoir vu, et même exactement tel qu’il le décrit. Il n’a donc ni feint d’avoir été enlevé au ciel, sous prétexte que cela ferait partie du genre littéraire apocalyptique, ni ne s’est emparé d’images ou formes littéraires préexistantes, éventuellement pour décrire une extase réelle. Son œuvre est originale et indépendante. Et s’il faut parler sérieusement de « genre littéraire », elle en est l’analogatum princeps. Si elle clôt la série des visions et prophéties bibliques authentiques, c’est parce que ces dernières (et avant tout celles de Daniel et d’Ézéchiel) étaient orientées, dans l’économie divine du salut, vers la « révélation » conclusive « de Jésus-Christ, que Dieu lui a donnée ». Il s’agissait de prophéties préparatoires et partielles de ce que Dieu voulait à présent révéler par le Christ à ses serviteurs, en le faisant « connaître par l’ange à son serviteur Jean » (1,1). À partir de ces présupposés, les trois motifs évoqués peuvent être maintenant développés de manière compréhensible. [...] S’il est vrai que Dieu veut donner dans ce livre [de l’Apocalypse] un aperçu de sa vérité, insaisissable et indéchiffrable en sa totalité avant la fin des temps, il ne le fait pas cependant sous forme de charades « à résoudre », dont on pourrait trouver la bonne « solution » avec beaucoup de perspicacité. On sera étonné en lisant ce commentaire de voir combien une interprétation peut être simple et sobre. Curiosité et goût du sensationnel n’y ont pas leur place. La parole de Dieu est trop sérieuse pour cela. Trop exigeante aussi pour ne pas être reçue en toute obéissance, avec toute la vie de foi. Et plus que tout, elle est trop sainte pour inviter à des épanchements et paraphrases poétiques. Cette œuvre d’Adrienne von Speyr est d’une parfaite retenue et sobriété. Bien que long, c’est un ouvrage dense, un livre de médiation foisonnant d’inspirations pour la prière personnelle. La meilleure manière d’en pénétrer le contenu est d’en lire chaque jour un bref passage et de laisser ce qu’on a reçu nous conduire à la rencontre personnelle avec la Parole qui est Dieu.